mardi 15 janvier 2013

Gabon : L’altérité en politique ou le regard de l'autre

Gabon : L’altérité en politique ou le regard de l'autre
L'altérité se définit simplement par la qualité de ce qui est autre tiré à la fois des mots latin «altéritas» qui signifie différence et « alter » qui signifie l'un, l'autre. L'altérité, ainsi comprise grâce à l'étymologie, met donc en jeu à la fois mon rapport à autrui et le sentiment que j'en retire de ma différence. Le questionnement des Gabonais dans leur relation ethnique participe à la redéfinition de chacun dans sa position dans la société. Ceci permet le passage de l'altérité (ce qui est autre) à la modernité (ce que je suis dans l'ensemble social). Ce sentiment péjoratif de ce qui est l'autre doit progressivement laisser la place à NOUS, la Nation.
Le refus de la dictature par la majorité des Gabonais est une chance inouïe et sans précédent d'accéder à l'idéal national. L'unité de ce pays et sa cohésion en Nation Gabonaise aboutie, sortiront vainqueur de ce combat démocratique que nous menons face à la dictature.
Rappelons-nous les Grecs au Ve siècle, alors disséminés en petits royaumes sans lien politique étroit, doivent résister à la poussée des Perses, qui tentent de coloniser la Grèce. Les Grecs sont obligés de se coaliser pour résister et par la suite remporter la victoire. Cette guerre contre les Perses est fondamentale: d'abord parce qu'elle occasionne l'alliance entre les Grecs, ensuite la constitution d'une politique. Elle donne naissance à une culture commune : l'Hellénisme. Aussi, parce qu'elle déclenche une véritable réflexion grecque sur le rapport à l'autre : 1-) Pourquoi les Grecs, jusqu'alors isolés dans de petits royaumes, ont-ils souhaité se coaliser pour s'opposer aux conquérants? 2-) Qu'est-ce qui définit la différence entre les cultures ethniques?
Au Gabon, nous faisons vite un plongeon dans une nation non pas en devenir mais en stagnation. Nous sommes encore au stade primitif ou chacun trouve barbare et sauvage tout ce qui n'est pas de son usage. Le manque de tolérance des uns vis-à-vis des autres, d'une ethnie à l'autre, s'ajoutent: les ambitions démesurées des uns, la convoitise des autres, la jalousie du voisin, l'égoïsme de tous. L'attitude des Gabonais est simplement déconcertante, on est bien loin du courage de l'ensemble des ethnies Grecques du Ve siècle face aux Perses.
Comment expliquer,cette forme de lâcheté qu'ont nos compatriotes ne pouvant faire face à leurs revendications face au pouvoir s'en prennent gratuitement à des innocents? Ainsi, ceux qui veulent mener et organiser des actions se heurtent à l'obstruction de leurs concitoyens qui ont choisi de jouer le pourrissement: du genre si "ce n'est pas moi ce ne sera pas lui, même pas eux..." Vu du pouvoir, tant que les Gabonais se querellent entre-eux, la paix sociale est assurée. Nous sommes loin de la théorie de Marx sur la lutte des classes, moteur de l'histoire.
Aussi, c'est triste de manquer d'imagination, d'avoir à toujours penser que le Gabon serait à la fois:  un éternel recommencement, une entité sans mouvement. Simplement parce que le pouvoir en place le souhaite. En d'autres termes, cela revient-il à considérer de façon insultante que le Gabon est à l'image des déclarations de Hegel ou encore récemment de Sarkozy sur l'Afrique et les Noirs? Une civilisation, un peuple sans histoire.
Les Gabonais manquent t-ils autant de culture au sens où Montaigne abordait la question c'est-à-dire dans la promotion de l'homme, de l'autre? Cette attitude humaniste qui passe par la prise en compte de l'autre, la mise en vérité d'autrui?
Vous comprenez dès lors, avec quelle facilité le pouvoir va réduire le débat à sa plus simple expression ethnique et, dans cette posture le peuple Gabonais est efficacement divisé. Aussi à y regarder en mode paysage, en lisant certaines déclarations, on constate que beaucoup d’opposants brillent par l’empoisonnement du débat public. Ils jettent des peaux de banane, s'opposent à l’union face à la dictature. Les débats sur les réseaux sociaux, les assises de Mouila sont là pour en témoigner.
Cela laisse à penser que les Gabonais ne se sentent en rien concernés par les évènements qui ont lieu dans leur pays et leur silence est consentant et coupable.
Aussi, peut-on penser que le régime au pouvoir depuis 45 ans est-il capable à lui tout seul de manipuler tout un ensemble d'ethnies aussi disparates que différentes sans le concours des uns et des autres? Dans ce chaos politico-social, la responsabilité collective n'est-elle pas engagée?
Sans se tromper, les Gabonais résument les problèmes de leur pays de façon binaire et primitif: 1-) Les problèmes du Gabon « C'est le PDG »; 2-) Les problèmes du Gabon « Ce sont les Fang »...
Autant d'excuses qui ne passent pas. Le problème du Gabon devient tellement complexe, compliqué, entrelacé et entremêlé qu'on peut se poser la question suivante: N'y-a-t-il pas un problème gabonais?

Pourquoi nous insistons sur la CNS? Parce qu'au-delà de la refondation de nos institutions républicaines; au-delà de la mise en place de la démocratie pour tous; au-delà de la rédaction d'une nouvelle constitution; au-delà de la mise en place de l’État de droit; au-delà de la mise en place d'un système électoral fiable: nous devons nous parler franchement. Y a-t-il un problème de vivre ensemble?
La science, le minimum de bon sens nous impose un minimum de critique, d'autocritique. Comme dit la chanson “l'avion ne regarde pas en arrière parce qu'il n' y a pas de rétroviseur”.
Gabonais ayez de l'audace et non l’extension de la polémique et de l'altérité.

Déjà au XVIe, Thomas More, dans la première partie d'Utopia, disait : « On se trompe en pensant que la misère du peuple est une garantie de paix... ». Pendant que le pouvoir prive les Gabonais de liberté fondamentale; pendant que les Gabonais vivent une misère d'un autre âge : pouvoir d’achat, éducation aux rabais, transport public inexistant, délinquance économique, banditisme, système de santé moyenâgeux, nivellement par le bas, crimes rituels… Certains s'amusent à se demander qui est Fang, qui est avec les Fang, qui soutient les Fang.. .?
Personne ne prend le temps de se demander quel est le bilan des promesses de l’émergence? Comment avons nous fait pour se retrouver dans un pays ou la mainmise des étrangers devient sans équivoque? Pourquoi entre nous le débat ethnique est récurrent?

Nos élites, nos ports étendards, qui en ne relevant pas le débat concourent activement à l'abrutissement des populations. Finalement on prend le risque de se dire qu'il existe des leaders ethniques, une élite accrochée à ses origines ethniques, un discours et une offre politique limitée, une population culturellement sous développée et cupide. Comment peut-on, va-t-on construire l'alternance? Ainsi, pour se maintenir les 20 prochaines années, le régime au pouvoir prend le risque de diviser les Gabonais, de désolidariser la nation. Personne ne sera épanouit, en paix à cause de "l'autre".
Les aspirations des uns, les ambitions des autres, les oubliés, les revanchards, les suiveurs et les faux prophètes.....Nous sommes dans une situation telle que: si aujourd'hui le régime s'écroulait brutalement, on est à même de se demander si on ne rentrera pas dans un chaos, dans une guerre ethnique. A force de brandir la fibre ethnique, à terme, les risques sont réels.
A moi, il m'est demandé : «  Pourquoi tu es dans un petit parti politique? » C'est quoi l'URDP? Aussi, personne ne prend la peine de se poser la question suivante: si un parti politique à lui tout seul s'octroie par bidouillage électoral 112 députés sur 120, il condamne tous les partis politiques du pays à rester des petits partis. En politique la grandeur d'un parti se mesure au nombre de ses élus.
A moi, il m'est demandé : «  Votre parti n'est-il pas un parti familial? ». Personne ne prend la peine de réaliser que le vrai parti familial du Gabon c'est le PDG. Le grand camarade président fondateur n'a-t-il pas été remplacé par son fils à la tête du parti?
On veut nous faire accepter que tout ce qui se passe au Gabon est du domaine du normal, tout est normal: 45 ans de dictature, c'est normal; l'enrichissement illicite, c'est normal; la pauvreté des Gabonais, c'est normal; l'usurpation du pouvoir, c'est normal.... Voilà la réalité du pays, l'indexation de tous ceux qui veulent que les lignes bougent. Pendant ce temps, que font les autres? Eh ben! Ils sabrent le champagne.
Ainsi, au manque de légitimité du pouvoir en place, l'opposition et la majorité des Gabonais répondent: par manque de cohésion; luttes intestines et absence de stratégies. Tout cela laisse à croire que cet équilibre arrange tout le monde.
L'année 2016 sera un tournant, un sacré nettoyage dans cette phase ultime du combat politique. Beaucoup de leaders politique de part et d'autre des lignes atteints par l'âge, par l'assèchement des biens mal acquis, entretenant un discours élastique, seront naturellement éliminés.

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